Dans le cadre d’un renvoi préjudiciel introduit par le tribunal administratif supérieur du Land de Bavière, Allemagne (Bayerischer Verwaltungsgerichtshof), la Cour de Justice de l’Union européenne (CJUE) a été amenée à se prononcer[1] au sujet de l’obligation de mentionner le pays d’origine sur des emballages individuels de miel, conditionnés en cartons collectifs et livrés à des collectivités territoriales.
En effet, en application de la directive 2000/13/CE relative à l’étiquetage et la présentation des denrées alimentaires[2] les denrées alimentaires préemballées doivent mentionner leur lieu d’origine ou de provenance dans le cas où son omission serait de nature à induire en erreur le consommateur sur leur origine ou provenance réelle.
Par ailleurs, la réglementation allemande relative au miel prévoit expressément la mention du ou des pays d’origine sur l’étiquetage des miels.
Or, dans l’affaire en question l’entreprise allemande Breitsamer und Ulrich a fait l’objet d’une amende administrative en raison de la commercialisation de miel en portions individuelles qui ne mentionnaient pas son pays d’origine.
C’est dans ce contexte que la CJUE a été amenée à se prononcer sur la question à savoir si les portions individuelles de miel livrées aux collectivités territoriales dans des cartons collectifs mais vendus séparément aux consommateurs à un prix forfaitaire dans le cadre d’un repas constituent des « denrées alimentaires préemballées » au sens de la directive 2000/13/CE soumises, par conséquent, à l’obligation de mentionner leur pays d’origine.
En effet, selon l’entreprise allemande les portions individuelles de miel ne constituaient pas des « denrées alimentaires préemballées » (et par conséquent des « unités des vente ») au sens de la réglementation applicable dès lors que les emballages individuels présentés sous forme de coupelles fermées par un couvercle en aluminium ont été vendues dans des cartons collectifs aux collectivités territoriales comportant l’ensemble des mentions obligatoires dont notamment le pays d’origine du miel.
Par ailleurs, l’entreprise allemande a invoqué à l’appui de ses arguments un document établi par un groupe d’experts constitué par la Commission européenne, intitulé « Questions réponses sur l’application du règlement (UE) n°1169/2011 concernant l’information des consommateurs sur les denrées alimentaires »[3] aux termes duquel « les coupelles individuelles (par exemple, de confiture, de miel ou de moutarde) présentées aux clients de ces établissements comme partie intégrante du repas ne sont pas considérées comme des unités de vente. Dans de tels cas, les informations ne doivent donc figurer que sur l’emballage groupé. » (Point 2.1.3)
La CJUE a rejeté ces arguments en considérant que les portions individuelles de miel telles que celles en cause dans le litige constituaient des « denrées préemballées » au sens de la directive 2000/13 soumises à l’obligation d’indiquer le pays d’origine (dès lors qu’elles étaient vendues en l’état au consommateur final). La Cour précise que cette obligation ne serait pas, en revanche, applicable dans l’hypothèse où la face la plus grande de leur emballage serait inférieure à 10cm².
Aussi, la CJUE a rejeté l’argument tiré du document du groupe d’experts invoqué par la requérante en précisant que celui-ci ne présentait aucun caractère contraignant. A ce titre, la Cour souligne que le document, lui-même, indique son absence de valeur juridique.
Cet arrêt de la CJUE a suscité un certain nombre de critiques dès lors qu’il est de nature non seulement à alourdir les obligations d’étiquetage à la charge des opérateurs mais dans un cadre plus général il remet même en question la valeur juridique des documents d’orientation établis par les institutions européennes (lignes directrices, guides d’application etc.) qui sont largement utilisés par les opérateurs comme une source d’information pour la bonne application de la réglementation européenne.
[1] Arrêt du 22 septembre 2016 (C-113/15 )
http://curia.europa.eu/juris/document/document.jsf;jsessionid=9ea7d2dc30d584122d2464d74c6e9b26c188eb0acb61.e34KaxiLc3qMb40Rch0SaxyKch10?text=&docid=183706&pageIndex=0&doclang=fr&mode=lst&dir=&occ=first&part=1&cid=606653
[2] Cette directive a été remplacée en 2011 par le règlement INCO (n°1169/2011)
[3] https://ec.europa.eu/food/sites/food/files/safety/docs/labelling_legislation_qanda_application_reg1169-2011_fr.pdf